red apple and books stacked in classroom

Les erreurs du passé

L’échec de la réforme scolaire et les « théories romantiques de l’éducation »

Les résultats de la réforme scolaire au Québec ne sont pas au rendez-vous, a montré une étude menée à l’Université Laval. Axée sur les compétences disciplinaires et transversales des élèves, elle a eu un très faible effet positif sur les élèves performants et n’a pas permis d’améliorer les résultats scolaires des garçons et des élèves en difficultés.

Steve Bissonnette estime que le Québec n’a pas su identifier les meilleures pratiques. La province s’est inspirée naturellement de la France et d’autres pays francophones, alors que leurs performances dans les épreuves internationales n’étaient pas au rendez-vous.

Le chercheur qualifie de « séduisantes », voire « romantiques » les théories qui ont servis à construire la réforme québécoise.

Le problème politique

Égide Royer joint sa voix à celle de Steve Bissonnette, affirmant que le Québec « s’obstine à ne pas appliquer les pratiques que l’on sait exemplaires. On a des mythes, des conceptions qui ne tiennent pas compte des données probantes ou des données de recherche. »

La succession effrénée de ministres de l’Éducation au gouvernement du Québec, avec 10 ministres en 14 ans, n’est rien pour aider.

Pour lui, le problème vient à la fois de la sphère politique et d’un certain désintérêt de la population québécoise pour les affaires scolaires.

Trois mythes en éducation

D’après les experts, des mythes concernant l’éducation perdurent au sein de la population et des décideurs politiques. Trop de décisions sont prises au détriment de ce que dit la recherche.

1. Investir plus d’argent en Éducation conduit nécessairement à une augmentation de la réussite scolaire des élèves. C’est un discours récurrent dans les milieux syndicaux et les mouvements citoyens. C’est aussi, par moment, celui des partis politiques, pour qui il est facile d’annoncer de nouvelles sommes sans détailler davantage son programme.

Pour Steve Bissonnette, l’argent « est un facteur nécessaire, mais insuffisant pour provoquer la réussite. » Certes, la réforme ontarienne a eu un coût : 3 milliards de dollars. Mais encore faut-il que l’argent soit bien investi. Le système québécois regorge à cet effet de tristes exemples.

Au début de la réforme scolaire, le ministère de l’Éducation a déployé la stratégie d’intervention « Agir autrement » dans les écoles secondaires de milieux très défavorisés. Un projet de 250 millions de dollars, « de l’argent neuf » qui n’a entraîné « aucune amélioration » sur la performance des élèves et l’obtention de diplômes, affirme M. Bissonnette. Pire encore, les écoles de comparaison où la stratégie n’a pas été implantée ont mieux performé.

Autre exemple : le programme d’aide aux leçons et aux devoirs. « C’est comme verser de l’eau dans le sable, peste Égide Royer. Vous seriez surpris des dizaines de millions qu’on a dépensés sur les mesures d’aide aux leçons et devoirs depuis les années 90, avec pratiquement pas d’effets. »

2. Pour mieux intervenir auprès des élèves en difficulté, il faut augmenter le nombre d’enseignants et d’intervenants dans une école ou diminuer le nombre d’élève par classe. En fait, dit M. Royer, c’est d’abord du côté de la qualité de la formation des éducateurs qu’il faut regarder.

3. Il faut décentraliser les pouvoirs vers les écoles. C’est l’un des objectifs de la loi 86 actuellement à l’étude au gouvernement du Québec, qui vise à donner plus de pouvoirs aux directions d’écoles et à impliquer davantage les parents et le personnel scolaire.

Sans remettre en question la bonne foi de ces personnes, le chercheur n’est pas convaincu qu’elles seront bien outillées pour prendre des décisions basées sur la recherche et les bonnes pratiques. La création d’un institut national de recherche serait alors d’autant plus indiquée.

Il y a enfin la question de la répartition des budgets entre les écoles et les conseils scolaires. Le projet de loi 86 risque « d’encourager les écoles qui vont bien, et de diminuer les ressources des écoles qui vont moins bien », estime M. Royer.

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